Dématérialisation et digitalisation des services de paiement: Ces grandes initiatives de la BCEAO

• Comment l’institution prépare la lutte contre le blanchiment de capitaux

À la faveur du forum africain de la presse économique et financière, organisé par Russel Lohoré, promoteur du Forum de la presse économique et financière (FAPEF), les 25 et 26 mars 2021, Mme Gisèle Keny Ndoye, directrice de l’inclusion financière à la Bceao, a fait une communication sur les initiatives de l’institution. Vu les enjeux à court et long terme, elle invite chaque État à s’orienter vers ces services digitaux qui ont pour vocation de permettre à un grand nombre de la population d’avoir accès auxdits services. Ci-dessous, la première partie des enjeux de la digitalisation des services de paiement. .

Qu’est-ce que la digitalisation des paiements ?

D’une manière générale, la digitalisation, pour une entreprise ou un État, consiste à automatiser ses services ou opérations et à numériser de bout-en-bout ses processus métiers, de manière à les rendre accessibles en ligne et en temps réel. Plus spécifiquement, la digitalisation des paiements consiste en la numérisation de bout en bout des transactions financières, à savoir les recettes et les dépenses. Les processus et les méthodes de travail sont ainsi supportés par des solutions digitales permettant à l’informatique de prendre une place prépondérante dans l’exécution des missions. Cette dynamique, devenue une réalité dans la gestion des entreprises et au niveau des administrations des États, permet d’accélérer les processus, d’optimiser le temps de travail et de développer des opportunités dans tous les secteurs d’activités, tout en limitant les erreurs. La numérisation des paiements des États vise à :
1- favoriser une croissance économique plus large et plus forte, en approfondissant l’intermédiation financière et en augmentant l’efficacité et l’accès aux services de paiement, d’épargne, d’assurance et de crédit ;
2- augmenter les opportunités et les avantages économiques pour les populations en permettant une réduction des coûts d’accès aux services et une transparence accrue des opérations ;
3- améliorer pour les ménages, le contrôle de leurs finances, de leurs revenus et de leurs décisions budgétaires.
Les transactions financières des États
Les gouvernements effectuent un large éventail de paiements et perçoivent des impôts, des taxes et des redevances qui les mettent en relation avec les entreprises publiques et privées ainsi que les particuliers. Au titre des paiements, plusieurs types de flux sont identifiés :
• (i) du gouvernement vers les personnes «G2P» : ces paiements sont effectués en direction des populations. Ils concernent, notamment, les pensions de retraite aux agents de l’État, les prestations de sécurité sociale, les salaires, les allocations de ressources sous forme de dons, les bourses et les indemnités, etc. ;
• (ii) du gouvernement vers les entreprises privées « G2B » : ils sont généralement effectués à l’attention des entreprises privées installées sur le territoire national et ont notamment trait aux paiements des fournisseurs de biens et services ;
• (iii) du gouvernement vers les entreprises publiques «G2G» : ces transactions concernent les échanges entre le gouvernement et les entreprises du secteur public et les collectivités locales. Le tableau, ci-après, illustre les principaux flux d’opérations de l’administration publique.

Les transactions financières digitalisées au niveau des États membres de l’UEMOA

Sur la base de l’étude réalisée par la BCEAO et la Banque Mondiale en 2019, les principaux flux de paiement enregistrés au niveau des administrations publiques des États de l’UEMOA se limitent à trois (3), sur les six (6) identifiés précédemment, avec des disparités entre les pays. Il s’agit des transactions :
1- des gouvernements vers les personnes « G2P » ;
2- des personnes vers les gouvernements « P2G » ;
3- des entreprises vers les gouvernements « B2G ».
I.3.1- Les flux de paiement G2P

Dans l’Union, une importante frange de fonctionnaires bénéficie du paiement numérisé de leurs salaires, des pensions de retraite, des bourses universitaires et autres aides sociales de l’État. Les structures étatiques prioritairement impliquées sont la Direction Générale du Trésor et les Caisses de Retraite des agents de l’État. Un effort considérable est relevé au niveau de la digitalisation de ce type de paiement public dans les États. Toutefois, il existe encore un énorme potentiel en matière de digitalisation, qui pourrait être bénéfique, non seulement pour les populations concernées, mais aussi pour les gouvernements. Les bénéfices au niveau des gouvernements pourraient se mesurer en termes de gain financier, de productivité et de temps dans le processus de paiement. Au niveau des populations, la digitalisation des flux de paiement « G2P » offre un avantage en matière de proximité et d’accessibilité des points de paiements, d’économie sur les salaires et les pensions. En effet, les bénéficiaires des paiements des États pourraient éviter de longs déplacements et files d’attente au niveau des caisses. L’utilisation des canaux numériques de paiement leur permettrait également d’accroître leur épargne. Ce faisant, les conditions de vie des populations seraient améliorées et les relations entre l’État et les citoyens, renouvelées, avec des avantages certains pour l’ensemble des parties.

I.3.2- Les flux de paiement P2G
Les paiements « P2G », relatifs aux impôts et taxes, aux factures d’eau et d’électricité ainsi qu’au règlement des frais de scolarité et des soins de santé, connaissent un processus de digitalisation bien avancé au sein des États de l’UEMOA. La numérisation de ces taxes municipales et frais de services publics constitue une opportunité pour les États, les collectivités locales et les établissements publics car, leur permet (i) de réduire les coûts de collecte des redevances, (ii) de mobiliser davantage de ressources, (iii) de soutenir le développement local et (iv) d’élargir l’accès des populations peu bancarisées ou non-bancarisées dans l’Union aux services financiers. Pour les populations concernées, les avantages de la digitalisation se situent aux niveaux de la commodité, du gain de temps, de la fiabilité et surtout de l’augmentation de la probabilité d’une utilisation pérenne de ces services de paiement.

I.3.3 – Les flux de paiement B2G

Les paiements des entreprises vers le gouvernement « B2G », qui portent sur les impôts, les taxes et les droits de douane, visent à accroître la productivité et à contribuer à la création de richesse au sein des États. Dans l’UEMOA, des initiatives éparses naissent en faveur de la télédéclaration des impôts et du télépaiement des frais de douane. Il ressort globalement, de cette situation, que d’importants efforts restent à consentir pour le développement des paiements numériques des entreprises vers le gouvernement. La digitalisation de ces flux de paiements permettrait aux États de sécuriser davantage leurs recettes, par une introduction d’incitations préférentielles aux entreprises, qui s’acquitteraient de leurs redevances via les moyens de paiement numériques. En outre, elle contribuerait à développer les petites et moyennes entreprises, à travers leur accompagnement vers le secteur formel. Enfin, elle permettrait aux États de soutenir les efforts engagés dans l’appui à l’autonomisation des populations financièrement vulnérables dans l’Union, que sont les jeunes, les femmes, les producteurs ruraux et les porteurs de projets d’entreprises. Ainsi, la digitalisation de l’ensemble des flux de paiements des États permettrait de stimuler la promotion de l’inclusion financière dans l’UEMOA. Suite, demain : Justification et portée de la digitalisation des paiements..

Source Bceao
Légende : Gisèle Keny Ndoye, directeur de l’inclusion financière à la Bceao.

Encadré
Comment l’institution prépare la lutte contre le blanchiment de capitaux
Bien que la digitalisation des services de paiement fasse partie à la fois de l’intégration financière et économique au niveau de la région ouest africaine, elle implique également la lutte contre le blanchiment de capitaux. A ce propos, la Bceao travaille sur une plateforme devant permettre à terme d’identifier tous les usagers des services à vocation digitale. De sorte à connaître le type d’utilisateurs desdits services. Cette action qui vient en appui à la Carte d’identité régionale lancée par la Cedeao en cours, ne vise rien d’autre que de se faire une idée globale des utilisateurs des services digitaux, mais en plus, de lutter contre le blanchiment de capitaux. La Bceao, au dire de Mme Gisèle Keny Ndoye, y travaille.
HK

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