Le conseil d’administration du Fonds monétaire international (FMI) a conclu les consultations au titre de l’article IV avec la Côte d’Ivoire et approuvé sans réunion, l’évaluation des services du FMI selon la procédure de défaut d’opposition.
À la faveur d’une grande stabilité macroéconomique, la Côte d’Ivoire s’est montrée résiliente face à la pandémie de la COVID 19, grâce aux politiques efficaces mises en place par les autorités pour y répondre. Le nombre de décès liés à la COVID-19 y reste faible si on le compare aux chiffres du reste du monde. La campagne de vaccination se poursuit et environ 70 % de la population visée a déjà reçu une première dose.
L’économie s’est fortement redressée en 2021 avec une croissance estimée à 7 % (contre 2 % en 2020), tandis que l’inflation annuelle s’est hissée à 4,2 % en raison des chocs externes et de l’offre. Le déficit budgétaire global a atteint 5,1 % du PIB (ce qui est inférieur aux prévisions), principalement en raison des améliorations observées dans le recouvrement des recettes douanières et dans l’administration fiscale, qui ont compensé l’augmentation des dépenses de sécurité.
La détérioration de l’environnement extérieur due à la guerre en Ukraine et les défis liés à la sécurité dans la région devraient peser sur les perspectives macroéconomiques en 2022. Les services du FMI estiment que la croissance devrait ralentir et s’établir à 6 % cette année en raison de l’atonie de la demande mondiale, de la détérioration des termes de l’échange et d’une incertitude accrue, tandis que l’inflation devrait encore augmenter pour atteindre environ 5½ %. Les autorités ivoiriennes ont mis en œuvre plusieurs mesures temporaires pour contenir les effets de la guerre en Ukraine, comme le plafonnement du prix de plusieurs produits alimentaires.
Cependant, la situation à court terme est caractérisée par des risques baissiers découlant principalement des répercussions mondiales de la guerre en Ukraine, du resserrement de la politique monétaire dans les pays avancés et de l’augmentation du coût d’emprunt qui l’accompagne, ainsi que de l’émergence de nouveaux variants de la COVID 19 et de l’instabilité persistante dans certains pays voisins. Les perspectives de croissance à moyen terme restent robustes avec la Côte d’Ivoire bénéficiant également de risques haussiers, notamment la découverte d’importantes réserves de pétrole et de gaz. La mise en œuvre rigoureuse des réformes prévues dans le cadre du plan national de développement (PND) 2021–25 permettrait de stimuler la croissance à moyen terme.
Évaluation par le conseil d’administration
La mise en œuvre rapide de politiques bien conçues, étayée par l’adoption de politiques macroéconomiques pertinentes au cours de la dernière décennie, a contribué à limiter le coût économique de la pandémie de COVID 19 en Côte d’Ivoire. La guerre en Ukraine a néanmoins affecté les perspectives du pays. Les mesures récemment prises pour contenir les effets de ce conflit sur l’inflation et l’économie devraient rester temporaires et cibler davantage les populations les plus vulnérables si la situation devait se prolonger. Les autorités doivent trouver un juste équilibre entre couvrir leurs dépenses prioritaires (avec notamment une hausse des dépenses de sécurité) et préserver une marge de manœuvre budgétaire suffisante pour faire face aux chocs futurs.
Les circonstances actuelles pourraient justifier un déficit budgétaire légèrement plus élevé que celui prévu au budget cette année. Toutefois, il est encore possible pour la Côte d’Ivoire de converger vers l’objectif de déficit de 3 % du PIB fixé par l’UEMOA d’ici 2024. L’analyse de viabilité de la dette continue d’indiquer l’existence d’un risque modéré de surendettement, mais aussi d’une marge de manœuvre très limitée pour absorber les chocs futurs, dans un contexte marqué par la détérioration des conditions de marché. Ce constat souligne la nécessité pour les autorités d’accélérer les efforts de mobilisation des recettes intérieures.
Il est essentiel que la Côte d’Ivoire poursuive ses réformes budgétaires pour se dégager une marge de manœuvre afin de financer ses dépenses prioritaires et soutenir la croissance inclusive. Si les résultats budgétaires se sont révélés meilleurs que prévus en 2021, ce qui tient en partie à des améliorations continues sur le plan des réformes de l’administration fiscale et du recouvrement des recettes douanières, notamment grâce à la numérisation, les recettes fiscales restent bien en deçà de l’objectif de convergence fiscale de l’UEMOA, qui est de 20 % du PIB. Il est essentiel de poursuivre les efforts en cours pour améliorer l’administration fiscale et rationaliser les exonérations fiscales, afin de financer les dépenses publiques en faveur de l’investissement, de la convergence sociale et de la prestation de services dans les régions mal desservies. La refonte et la simplification du régime de l’impôt sur le revenu des personnes physiques permettraient également d’améliorer sa progressivité.
Le nouveau programme social des autorités peut continuer à renforcer le capital humain. Bien que le pays ait réalisé des progrès significatifs pour rendre l’éducation plus accessible au cours des dernières années, des efforts supplémentaires visant à améliorer la qualité des systèmes d’éducation de base et de formation professionnelle contribueraient à réduire l’inadéquation des qualifications acquises par les travailleurs au regard des besoins du marché du travail. Malgré des progrès notables, assurer un accès équitable aux soins de santé demeure une priorité.
Il est essentiel que les autorités s’emploient sans relâche à améliorer le climat des affaires, renforcer les services publics et relever les défis du changement climatique pour stimuler une croissance inclusive et durable. Les autorités doivent accélérer le rythme des réformes pour éliminer les goulots d’étranglement dans les infrastructures, pallier les lacunes du cadre réglementaire, renforcer le régime foncier et la protection des droits de propriété, et simplifier les démarches administratives. La mise en œuvre rapide des réformes du PND 2021–25 serait utile et une forte participation du secteur privé permettrait de contenir les coûts budgétaires et de garantir que les efforts soient concentrés dans les domaines prioritaires. La poursuite des efforts dans la gestion des affaires publiques et la lutte contre la corruption pourront également contribuer à attirer les investissements privés. Les autorités se sont engagées à adopter des politiques appropriées favorisant l’adaptation et l’atténuation du changement climatique, notamment en matière d’agriculture durable et de préservation des forêts.
L’amélioration de l’inclusion financière et l’accès aux services financiers restent prioritaires pour libérer le potentiel du secteur privé. Le secteur bancaire pourrait mieux soutenir la croissance si les procédures d’insolvabilité et l’infrastructure du crédit étaient améliorées, et si les banques publiques sous-capitalisées étaient restructurées rapidement.
Il est prévu que la prochaine consultation au titre de l’article IV avec la Côte d’Ivoire se déroulera selon le cycle ordinaire de 12 mois.
Source : FMI